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Vendée Globe : freeride dans les alizés

En direction du Cap-Vert, la flotte de la 8e édition du Vendée Globe glisse plein pot dans un vent de nord-est soutenu (20 à 25 nœuds), agrémenté de grains violents, rendant la navigation parfois périlleuse, avec le risque de figures de style involontaires, voire de sorties de piste. Si Vincent Riou (PRB) conserve ce soir sa deuxième place derrière un Armel Le Cléac’h impérial sur son foiler, le Britannique Alex Thomson (Hugo Boss) ne fait que revenir sur le duo de tête. Il est désormais troisième et engrange plus de milles que ses camarades de jeu : 428 milles ces dernières 24 h. Du côté de la vie en mer, la douche était, en partie, au programme du jour !

La vie en mer, c’est juste une question de tempo… Depuis le départ dimanche dernier des Sables d’Olonne, le rythme de la course, la météo pas très claire, l’émotion et le vertige de se lancer dans un tour du monde en solitaire n’ont pas permis aux marins de s’occuper d’eux tout simplement. Fabrice Amédéo avouait cet après-midi à la vacation avoir éteint ses alarmes et dormi 4 heures d’affilée sitôt Madère débordée, Eric Bellion d’avoir été rempli de doutes et de s’être parlé à lui-même : « Je n’avais pas le moral. Je me parlais dans le cockpit. J’ai enfin ouvert les yeux sur mon aventure, sur le bonheur que je suis en train de vivre. » confiait-il avec beaucoup d’émotions durant le Vendée Live ce midi. Alors aujourd’hui, même si les conditions météo dans les alizés demeurent toniques et très sollicitantes pour les organismes, à bord des Imoca, on reprend un peu d’énergie : Nandor Fa a pris sa douche, Jean Le Cam s’est goinfré d’un bœuf-carottes, de rillettes, de pain-beurre et de bonbons, Kito de Pavant, au moment de se laver les dents, s’est rendu compte qu’il s’était trompé de trousse de toilettes, et Alan Roura n’a plus qu’un seul seau pour se laver, et faire ses besoins. Les petites histoires humaines du Vendée Globe sont toujours un délice…

Des écarts importants d’Armel à Didac : près de 1 400 milles « Ca envoie du steak » lançait Louis Burton ce matin sur une vidéo où l’on voyait son Bureau Vallée lancé en plein surf à 20 nœuds. Dès lors que les alizés sont montés, la tête de flotte a creusé l’écart. L’élastique s’est tendu. Il faut dire que les machines de course les plus performantes, comme celles des sept premiers, affichent des moyennes folles (entre 19 et 20 nœuds) qui le seront encore plus dans l’Hémisphère Sud, et que les pilotes sont des compétiteurs de haute voltige. « C’est intéressant d’avoir des conditions rapides. C’est génial d’avoir un combattant qui est rapide. C’est un bon concurrent. » expliquait froidement Armel Le Cléac’h ce midi. Le chacal est peu bavard, l’homme est totalement concentré. Dans cette course de vitesse, le moindre mauvais réglages ou choix de voile peut vous faire perdre du terrain : Yann Eliès est désormais à 110 milles de la tête de flotte, Jean-Pierre Dick à plus de 150 milles, Bertrand de Broc à 300 milles et Sébastien Destremau à près de 600 milles ! Didac Costa, lui, commence sa descente le long des côtes ibériques, et devrait toucher les alizés portugais demain au large de Porto. Déjà, les skippers réfléchissent à la manière de se positionner pour entrer dans le pot au noir et avant cela, comment déborder l’archipel du Cap-Vert pour ne pas se faire piéger dans son dévent… Ils ont dit Fabrice Amedeo (Newrest-Matmut) « Quand j’ai passé Madère, j’ai débranché mes alarmes, je n’ai pas mis de réveil et j’ai dormi quatre heures de suite. Ca fait du bien ! Je ne barre pas beaucoup, car le pilote est très efficace. En revanche, il faut être beaucoup sur les réglages. Ce n’est pas de tout repos, mais il faut absolument prendre du temps pour soi. Après cette vacation, j’irai prendre ma première douche et ça fera beaucoup de bien. Il fait frais sur le pont, on est en short t-shirt, mais il commence à faire très chaud à l’intérieur. Dès qu’il faut bouger comme pour le matossage ça devient pénible. Je suis très heureux en mer. Je participe à un évènement légendaire ; Je ne compte pas les jours. Je profite de chaque instant. Je me suis préparé une petite tartiflette ! »

Tanguy de Lamotte (Initiatives Cœur) « J’ai réussi à m’adapter au bateau et j’en suis content. J’ai un bon matelas, un bon siège de veille. Il y a juste plus de bruit. J’ai bien récupéré cette nuit. Je savais que ça allait être possible J’ai fait exprès d’être dehors les premiers jours et de moins dormir. Je suis en forme. La vie à bord est différente comparée à la précédente édition mais la différence vient surtout des bateaux autour. Ils ne sont pas loin. Là je suis plus dans le rythme de la course. Ça change le mode de vie. »

Vincent Riou (PRB) « Ca se passe pas mal ! On ne va pas se plaindre. C’est humide et engagé. Il faut s’occuper un peu du bateau. Les conditions sont comme j’imaginais. Il faut que je tape un peu dedans pour suivre les foilers. Je ne pensais pas les tenir autant. Je me doutais bien que allait être compliqué pour tout le monde. Je ne suis pas le plus rapide mais j’essaye d’avoir une bonne moyenne. C’est ce qui est important. Quand Armel prend la barre on sent qu’il accélère. La route est longue. Il faut trouver une routine. Je suis convaincu que le Vendée se joue d’abord dans la gestion des hommes et du matériel. »

Armel le Cléac’h, Banque Populaire VIII « Ça se passe bien. On fait route ensemble depuis hier avec Vincent (Riou). La route est encore très longue. C’est intéressant d’avoir des conditions rapides. C’est génial d’avoir un combattant qui est rapide. C’est un bon concurrent. Là j’ai le gennaker et un ris dans la GV. On va naviguer entre les Canaries et le Cap Vert. Il faut trouver les bons réglages pour aller vite. Les conditions sont rapides, au portant. Il faut aussi barrer. Même si il y a des moments de
transition. »

Eric Bellion (CommeUnSeulHomme) « Hier, je n’avais pas le moral. J’étais rempli de doutes. J’ai enfin ouvert les yeux sur mon aventure, sur le bonheur que je suis en train de vivre. Je suis sur une machine que j’apprends à découvrir. C’est comme si j’avais une moto GP et que je l’avais mise en mode mobylette. C’est compliqué d’être bien à sa place. J’ai eu du mal suite à l’émotion du départ, suite à la fatigue. J’ai mis les choses au point avec moi-même hier, je me parlais dans le cockpit. Au moment où j’ai fait ça, j’ai commencé à observer mon bateau, la mer. J’ai choqué les écoutes. Et le bateau s’est libéré et a accéléré. Pour la première fois, j’ai dormi. Je commence à prendre du plaisir à manger. Au début, c’était un geste automatique. C’était juste une espèce de boule au niveau de l’estomac. »

Conrad Colman, Foresight Natural Energy « C’est incroyable, tout à l’heure, même si je n’ai pas de foils, le bateau volait dans tous les sens. Actuellement, je suis sous spi, et ce, depuis que je me suis échappé de Madère hier soir. Les conditions sont belles. J’étais bien content de quitter l’archipel, car les conditions locales n’étaient pas favorables. Je suis très content de ma position dans la flotte. Je suis entouré de bateaux beaucoup plus neufs que le mien. C’est mieux que ce que j’attendais. Maintenant ça va être difficile, car c’est une ligne droite à pleine vitesse vers le Cap-Vert. J’ai une trajectoire Ouest pour éviter le dévent des Canaries et aller le plus à l’ouest possible pour le Pot au Noir. Même si il est à plus de 1000 milles. C’est quelque chose qui se prépare en amont. Mieux je serai placé et mieux ça sera. »

Enda O’Coineen (Kilcullen Voyager Team Ireland) IRL « Nous faisons du tourisme du côté des Canaries et des côtes africaines. J’ai une résidence secondaire sur Lanzarote et je voulais voir ce qui s’y passe (rires). J’ai eu une nuit assez dure. Le J3 s’est déroulé tout seul et cela m’a pris du temps. Ensuite j’ai cassé un ris. L’autre incident du jour est arrivé quand j’étais sur le pont à me démener avec la voile. J’avais mis de l’eau à chauffer et je l’ai laissé trop longtemps. Je me suis retrouvé avec un petit incendie à bord, mais ce n’était pas trop sérieux. »

Une nouvelle carto pour suivre la course sur tous les supports

Afin de répondre à la demande de certains internautes qui rencontraient des difficultés d’accès à la cartographie du Vendée Globe, une nouvelle version est disponible depuis hier avec une carte simplifiée et compatible avec tous les navigateurs. Vous pouvez désormais choisir votre option préférée pour accéder à la cartographie 2D ou 3D de la course. Pour les smartphones et les tablettes IOS ou Android, il est conseillé de télécharger l’application officielle du Vendée Globe sur les stores. Les applications ont été mises à jour et offrent une belle interactivité sur la cartographie, avec un accès rapide au module immersif 360°. Des améliorations seront apportées sur les différents supports tout au long de la course pour un plus grand confort de consultation.

Illustration de l’article : Louis Burton (FRA), skipper Bureau Vallee, en entrainement en solitaire avant le depart du Vendee Globe – le 13 Septembre 2016 – Photo Stephane Maillard / Bureau Vallee